LA FEMME, LE VIS À VIS DE L'HOMME

Dans la Bible, Dieu définit la femme par l’expression hébraïque "Ezer Kenegdo", tirée de Genèse 2:18 (וַיֹּאמֶר יְהוָה אֱלֹהִים לֹא־טוֹב הֱיוֹת הָאָדָם לְבַדּוֹ אֶעֱשֶׂה־לּוֹ עֵזֶר כְּנֶגְדּוֹ), une formule riche qui éclaire son rôle essentiel et complémentaire :

• Ezer (עֵזֵר) : signifie « aide » ou « secours ». Ce terme dérive du verbe עָזֹר (azar), qui se traduit par « secourir », « aider », « assister ». Loin d’impliquer une position subalterne, ezer est utilisé ailleurs dans la Bible pour décrire l’aide divine, comme dans Psaume 121:2 : « Mon secours [ezer] vient de l’Éternel ». Cela confère au rôle de la femme une dignité et une puissance significatives.

• Kenegdo (כְּנֶגְדּוֹ) : se traduit par « correspondant à lui », « en face de lui », ou « vis-à-vis ». Ce terme est formé de : "ke", une préposition signifiant "comme" ou "correspondant à"; et de "neged" qui signifie "en face de", "vis à vis", "devant", ou "opposé"; et "o", un suffixe pronominal signifiant "lui" (référant à l'homme).

  Ainsi, kenegdo implique une relation de réciprocité, un face-à-face dynamique où la femme est une partenaire qui complète l’homme tout en à étant distincte. C’est une aide qui s’oppose constructivement, un véritable face à face.

  
  

  Le grand commentateur juif Rachi (Rabbi Shlomo Yitzhaki, XIe siècle) enrichit cette compréhension dans son commentaire sur Genèse 2:18. Il explique que la femme, en tant que Ezer Kenegdo, joue un rôle actif et complémentaire : « Si l’homme est digne, elle sera une aide pour lui ; s’il n’est pas digne, elle s’opposera à lui pour le ramener dans le droit chemin. » Selon Rachi, la femme n’est pas une simple assistante, mais une partenaire qui, par sa présence et son influence, guide l’homme vers le bien ou le corrige lorsqu’il s’égare. Cette interprétation valorise le rôle de la femme comme une force morale et spirituelle, capable d’agir comme un miroir ou un contrepoids, renforçant ainsi sa dignité et son importance dans la relation.

  
  

Selon la Bible, la femme est l’opposé complémentaire de l’homme. C’est précisément parce qu’elle est différente qu’elle peut lui venir en aide ! Elle est véritablement son aide lorsqu’elle exprime sa propre personnalité, ses convictions et ses intuitions.

Une complémentarité fondée sur la différence

La Bible ne parle pas d’égalité mathématique entre les sexes, ni de supériorité, mais de différence féconde. La femme est appelée à exprimer avec force ce qu’elle est, ses convictions et ses intuitions. En affirmant sa singularité, elle joue un rôle actif dans le plan divin. Les récits bibliques abondent en exemples où les femmes influencent, guident, et parfois rectifient les décisions des hommes, souvent avec la confirmation de Dieu.

Exemples de femmes influentes dans la Bible

1. Sarah et la décision concernant Ismaël

   Lorsque Sarah demande à Abraham de renvoyer Ismaël, le fils d’Agar, Abraham est profondément attristé. Cependant, Dieu intervient et lui dit : « Écoute-la en tout ce qu’elle te dira » (Genèse 21:12). Abraham suit alors la volonté de Sarah, qui s’aligne sur le plan divin. Ce passage montre que la voix de la femme, lorsqu’elle s’exprime avec conviction, peut être un canal de la guidance divine.

2. Rébecca et la bénédiction de Jacob

   Rébecca joue un rôle crucial en s’assurant que Jacob, et non Ésaü, reçoive la bénédiction d’Isaac. Consciente que Jacob est destiné à porter l’héritage d’Abraham, elle orchestre un stratagème pour que la bénédiction lui soit accordée (Genèse 27). Bien qu’Isaac ait été trompé, il ne revient pas sur sa décision et bénit Jacob une seconde fois avant de l’envoyer chez Laban (Genèse 28:1-4). L’initiative audacieuse de Rébecca, guidée par sa compréhension du plan divin, est validée par le cours des événements.

3. Les femmes dans la vie de Moïse

   Moïse, le libérateur d’Israël, doit sa survie et sa mission à plusieurs femmes courageuses :

   • Yokébed, sa mère, qui le protège en le cachant et en le plaçant dans un panier sur le Nil.

   • Myriam, sa sœur, qui veille sur lui et facilite son adoption par la fille de Pharaon.

   • Batya (nom traditionnel de la fille de Pharaon), qui l’adopte et lui offre une éducation princière.

   • Séphora, son épouse, qui le sauve d’un danger spirituel en circoncisant leur fils (Exode 4:24-26).

     Ces femmes, par leur courage, leur ingéniosité et leur foi, permettent à Moïse de devenir le leader qui conduira le peuple hébreu hors d’Égypte. Leur rôle est fondamental dans l’histoire du salut.

4. Abigaël, la femme de discernement

   Abigaël, épouse de Nabal, est un exemple remarquable de sagesse et d’initiative (1 Samuel 25). Lorsque son mari offense David, provoquant une menace de représailles, Abigaël agit avec promptitude. Sans informer Nabal, elle prépare des provisions et va à la rencontre de David pour apaiser sa colère. Par son humilité, son éloquence et son discernement, elle évite un bain de sang et gagne le respect de David. Après la mort de Nabal, David la prend pour épouse, reconnaissant en elle une femme de grande valeur. Abigaël illustre la capacité de la femme à intervenir avec sagesse pour rétablir la paix et influencer positivement les événements.

5. Rahab, la femme de foi

   Rahab, une Cananéenne de Jéricho, joue un rôle décisif dans la conquête de la Terre promise (Josué 2). En accueillant et protégeant les espions envoyés par Josué, elle fait preuve d’un courage extraordinaire et d’une foi en le Dieu d’Israël, déclarant : « L’Éternel, votre Dieu, est Dieu dans les cieux en haut et sur la terre en bas » (Josué 2:11). En échange de sa loyauté, elle et sa famille sont épargnées lors de la prise de Jéricho. Rahab est plus tard intégrée au peuple d’Israël et devient une ancêtre du roi David (Matthieu 1:5). Son histoire montre que la femme, même issue d’un contexte marginal, peut changer le cours de l’histoire par sa foi et ses actions.

6. D’autres femmes marquantes

   La liste des femmes influentes est longue et inclut des figures comme :

   • Léa et Rachel, matriarches des douze tribus d’Israël, dont la persévérance et la foi ont façonné la nation.

   • Tamar, qui, par son audace, assure la continuité de la lignée de Juda (Genèse 38).

   • Ruth, dont la loyauté et la fidélité la placent dans la généalogie de David.

   • Esther, dont le courage sauve le peuple juif de l’extermination.

   • Débora, prophétesse et juge, qui guide Israël avec autorité et mène le peuple à la victoire (Juges 4-5).

     Ces femmes démontrent que leur rôle est loin d’être secondaire : elles sont des actrices décisives du plan divin.

     
     

Une aide, pas une servante

La Bible ne présente pas la femme comme une esclave ou une servante, mais comme une partenaire complémentaire. Loin d’être inférieure, elle est dotée par Dieu de qualités spécifiques qui équilibrent et enrichissent celles de l’homme. Comme le dit le livre des Proverbes, « une femme vertueuse est une couronne pour son mari » (Proverbes 12:4), et « sa valeur dépasse celle des perles » (Proverbes 31:10). Ces images soulignent sa dignité et son importance. La femme n’est pas là pour se soumettre servilement, mais pour exprimer ce qu’elle est, apportant ainsi une contribution unique et essentielle.

Une vision intemporelle

En définitive, la conception biblique de la femme est profondément libératrice. En tant qu’Ezer Kenegdo, elle est une force vive, une voix prophétique, une actrice du plan divin. Loin d’être cantonnée à un rôle passif, elle est appelée à accompagner, défier et élever l’homme dans leur mission commune. Cette vision, ancrée dans la complémentarité et la différence, offre une perspective riche pour comprendre la beauté des relations humaines et la sagesse de la création divine.

L. Gilman