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LE PÉCHÉ IMPARDONNABLE



Pendant tout un été, une jeune femme d’une famille respectable et d’une éducation religieuse eut l’habitude de me faire demander, de temps en temps, pour des conversations religieuses. Elle n’avait aucun espoir, et son esprit était uniformément triste. Elle apparaissait étrangement abattue. Jour après jour, tandis que je lui rendais visite, j’ai essayé aussi pleinement que possible, de dérouler les promesses divines, et toute la plénitude de Christ pour satisfaire tous les manques possibles des pécheurs qui croiront en Lui. Elle restait toujours aussi triste et abattue que jamais. Son sujet le plus courant était l’ampleur de ses péchés ; elle était une telle pécheresse qu’il n’y avait aucune miséricorde pour elle. Sans cesse, je lui montrais l’erreur de cette notion, par les déclarations claires de la Bible, et par la nature du salut obtenu par le Sauveur ; et je lui montrais l’urgence du devoir immédiat d’entendre l’appel de l’Evangile à se repentir et à croire en Jésus Christ, pendant que le Saint-Esprit luttait avec elle. Je l’assurais qu’aucun pécheur ne doit être perdu parce que ses péchés sont grands vu que « le sang de Jésus Christ purifie de tout péché » ; et si un pécheur périt, il doit périr parce qu’il ne se repent pas et ne croit pas, non parce que le mérite de Christ est insuffisant pour atteindre l’étendue de sa culpabilité, et non parce que Christ ne lui est pas gratuitement offert, dans la pleine sincérité et la pleine gentillesse de Dieu.


Un jour, alors que je poussais cet argument et l’implorais d’être réconciliée avec Dieu en cédant dans son cœur aux persuasions du Saint-Esprit, elle me dit :


« Je crois que j’ai commis le péché impardonnable ! »

« Qu’est-ce qui vous fait penser ça ? » dis-je.

« Pourquoi – je le sens, » dit-elle avec hésitation.

« Qu’est-ce qui vous fait sentir ça ? »

« Le Seigneur m’aurait pardonné avant ce jour, si il y avait eu un pardon pour moi. »

« Il vous pardonnera maintenant, si vous vous repentez du péché et croyez en la rédemption de Christ. »

« Non ! » dit-elle, « J’ai commis le péché impardonnable ! Il n’y a aucun pardon pour moi ! » Elle pleura et sanglota tout haut.

Je dis, « Depuis combien de temps pensez-vous que vous avez commis le péché impardonnable ? »

« Je le sais depuis longtemps. »

« Quel est le péché impardonnable ? »

« Le péché contre le Saint-Esprit, qui n’a jamais de pardon, jamais dans ce monde, ni dans le monde à venir. »

« Quel est le péché contre le Saint-Esprit ? »

Après beaucoup d’hésitation, elle répondit, « C’est le péché que Jésus Christ a mentionné – parler contre le Saint-Esprit. »

« Avez-vous parlé contre le Saint-Esprit ? »

« Oh non ! Je n’ai pas fait ça ! » Dit-elle.

« Que voulez-vous dire alors ? Quel est votre péché impardonnable ? »

Elle ne donna aucune réponse, et je continuais à demander, « Quand avez-vous commis ce péché impardonnable ? » Elle ne dit rien.

« Dites-moi ce que c’est. » Elle ne répondit rien.

« Comment en êtes-vous arrivée à le commettre ? » Elle ne dit rien.

« Qu’est-ce qui vous fait penser que vous l’avez commis ? »

« Dieu m’aurait pardonné avant ce jour, si je ne l’avais pas commis. »

« Avant ce jour ? Que voulez-vous dire ? »

« Pourquoi, cela fait un long moment que je cherche la religion. »

« Et parce que vous l’avez cherché si longtemps, vous pensez que ce n’est pas une de vos fautes actuelles qui fait que vous ne l’avez pas trouvé ; mais que Dieu ne vous pardonnera pas, parce que, il y a des mois, vous avez commis le péché impardonnable – est-ce ce que vous voulez dire ? »

« Oui, monsieur. »

« Très bien, » dis-je, « je présume que vous ne voulez rien de plus de moi, si vous êtes impardonnable. Je ne peux rien faire pour vous si c’est le cas. Je peux tout aussi bien partir. Vous pouvez peut-être aller dans votre placard, et dire à Dieu, tandis que vous vous agenouillez devant Lui, que vous voulez vous repentir ; que vous voulez croire en Christ, et vous voulez obéir à Dieu en toutes choses ; et que ce n’est pas votre faute si vous n’êtes pas chrétienne. Dites-Lui que la seule chose maintenant sur le chemin de votre salut est ce vieux péché impardonnable, qu’Il ne pardonnera pas. Au revoir. »


Je la laissais immédiatement. Le jour suivant, elle me fit demander à nouveau. Je la trouvais, de façon inattendue, dans le même état d’esprit, s’appesantissant tristement sur le péché impardonnable. Après beaucoup de conversation et ayant pour but d’enlever la difficulté, et en l’assurant de son erreur, elle insistait encore, « J’ai commis le péché impardonnable, je le sais, je le sais, je le sais. »


J’ai désiré, après quelques instants, qu’elle cesse son agitation, et qu’elle fixe ses pensées sur les choses que j’allais lui dire. Je dis, « Je parlerai très clairement. Vous en comprendrez chaque mot. Certaines des choses que je dirai peuvent vous surprendre, mais je veux que vous vous les rappeliez. Tout au long de l’été, je vous ai traitée avec la plus grande gentillesse et la plus grande indulgence. Je suis toujours venu vers vous quand vous m’avez demandé, et souvent quand vous ne l’avez pas fait. Et c’est parce que je sens encore de la gentillesse envers vous, souhaite vous faire du bien, que je dirai maintenant des choses très simples que vous n’aimez peut-être pas, mais qui sont vraies :

« Premièrement, vous dites que vous avez commis le péché impardonnable ; mais vous ne croyez pas ce que vous dites. Vous ne croyez pas une telle chose. Vous savez, évidemment, que vous êtes pécheresse ; mais vous ne croyez pas que vous avez commis le péché impardonnable. Vous n’êtes pas honnête, pas sincère quand vous dites ça. Vous ne le croyez pas. »

« Deuxièmement, c’est de l’orgueil, l’orgueil stupide d’un cœur méchant, qui vous fait dire que vous avez commis le péché impardonnable. Influencé par l’orgueil, vous en êtes arrivés à moitié (seulement à moitié après tout), à croire que vous l’avez fait. Vous souhaitez vous élevez vous-même. Vous prétendez que c’est une chose grande et singulière qui vous empêche d’être chrétienne. C’est le péché impardonnable. L’orgueil siège à la base de tout ça. »

« Troisièmement, vous n’avez aucune raison d’avoir cet orgueil. Il n’y a rien de très singulier vous concernant. Vous êtes tout à fait comme les autres pécheurs. Il y a peu de chance que vous puissiez commettre le péché impardonnable, si vous deviez essayer. Ne pensez pas que vous en sachiez assez pour le commettre. »

« Pourquoi », dit-elle, « N’y a-t-il pas un tel péché ? »

« Si ; mais vous ne savez pas ce que c’est ; et vous n’en savez pas assez pour le commettre. »

« Quatrièmement, vous êtes une des créatures les plus suffisantes que j’ai jamais vu ! Vous essayez de penser que vous n’êtes pas autant à blâmer pour votre irréligion – que vous voulez être chrétienne, et en seriez une, si ce n’était pas pour ce péché impardonnable, que vous essayez, dans votre orgueil, de croire que vous avez commis. Vous prétendez que ce n’est pas votre péché actuel et le plus cher qui vous garde dans votre impénitence. Oh, vous êtes suffisamment bien, sûrement pour vous repentir ; Vous vous repentiriez, en fait vous voudriez, si ce n’était pas pour ce péché impardonnable. C’est votre cœur ; la suffisance et l’orgueil. »

« Cinquièmement, votre cœur mauvais s’accroche à cette idée du péché impardonnable, comme une excuse pour votre impénitence continue, pour votre vie dans l’indulgence du péché, l’incrédulité, et la désobéissance à Dieu, tous les jours. Votre excuse ne tiendra pas. Vous la faites de manière hypocrite. Ce n’est pas le péché impardonnable qui vous empêche d’être chrétienne ; mais votre méchanceté de cœur, votre orgueil, votre vanité et votre hypocrisie. Je n’aurai plus jamais rien à vous dire sur le péché impardonnable. Si vous aviez une conviction réelle et juste du péché, vous ne l’appelleriez jamais le péché impardonnable. »


Plusieurs mois après ça, elle me fit appeler en grand désarroi. Mais, maintenant, sa plainte était qu’elle avait un cœur méchant, trompeur et dur, opposé à la loi de Dieu. Elle devint, en fin de compte, tandis qu’elle croyait, une vraie pénitente, et professa sa religion publiquement. Mais, dans tous ses exercices religieux, rien de très particulier n’apparut, et elle ne me parla plus du péché impardonnable.


La vraie lumière dans la conscience est une chose, et l’obscurité trompeuse dans le cœur orgueilleux en est vraiment une autre. Quand un pécheur a un juste sens de sa condition, comme étranger à un Dieu saint, il n’aura pas tendance à penser au péché impardonnable. La fausse conviction est courante, mais vaine.



Ichabod Spencer (1798-1854)

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