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LES CHRÉTIENS ET LE RECOURS À LA LOI



De nombreux chrétiens hésitent à recourir à la loi quand ils sont confrontés à la violence. Ils pensent qu’une démarche authentiquement chrétienne, c’est de pardonner, et d’inciter au pardon.

Ce qui revient souvent à ne pas reconnaître le mal qui a été fait, à fermer la porte à la reconstruction de la victime, et à laisser agir quelqu’un de dangereux.

Dans les Églises, il y en a qui maîtrisent tellement bien le langage évangélique qu’ils arrivent à manipuler leurs victimes, à berner les responsables, voire à diviser l’Église sur la conduite à tenir. Le pardon, ce n’est qu’une partie de l’histoire, et nous en avons parlé.


Pour d’autres chrétiens, un texte biblique interdit d’aller au-devant de la justice. Il vaut la peine de le lire, c’est 1 Corinthiens 6.1-8. Dans la Bible du Semeur il y a un sous-titre : Des procès entre chrétiens. Voici le passage :

Lorsque l’un de vous a un différend avec un frère ou une sœur, comment ose-t-il le citer en justice devant des juges incroyants au lieu de recourir à l’arbitrage des membres du peuple saint ? Ignorez-vous que ceux-ci auront un jour à juger le monde ? Si donc vous êtes destinés à être les juges du monde, seriez-vous incapables de vous prononcer sur des questions bien moins importantes ? Ne savez-vous pas que nous jugerons même les anges ? Et nous serions incompétents pour les affaires de la vie présente ! Or, si vous avez des litiges au sujet des affaires de la vie courante, vous prenez comme juges des gens qui ne comptent pour rien dans l’Église ! Je le dis à votre honte ! N’y a-t-il vraiment pas un seul homme sage parmi vous qui puisse servir d’arbitre entre ses frères ? Faut-il qu’on se traîne en justice entre frères et qu’on aille plaider l’un contre l’autre devant des incroyants ? De toute façon, vos différends constituent déjà une défaite. Pourquoi ne souffrez-vous pas plutôt l’injustice ? Pourquoi ne consentez-vous pas plutôt à vous laisser dépouiller ? Mais non, c’est au contraire vous qui commettez des injustices et dépouillez les autres, et ce sont vos frères que vous traitez ainsi !


On ne lave pas son linge sale en public, pense-t-on. On ne compromet pas la réputation de l’Église en dévoilant quelque chose de honteux devant les autorités. On protège ce qu’on appelle le témoignage. On évite d’être en situation d’avoir honte. Du coup, en protégeant son honneur, on ne protège pas les victimes, et on s’expose à être encore plus honteux quand la vérité éclatera.


De quoi parle 1 Corinthiens 6 ? Il s’agit probablement de différents commerciaux et financiers. Verset 4, ce sont les affaires de la vie courante. Verset 6, quelqu’un traîne ses frères en justice, verset 7 il pense qu’il a été dépouillé d’un bien, qu’il a perdu de l’argent, ou qu’il en perdra. Et verset 8, la personne qui va en justice vise à dépouiller son adversaire. Il y a de la hargne, il y a une rupture de communion fraternelle, il y a de l’égoïsme dans l’air, et du mépris pour les anciens qui doivent veiller à la santé spirituelle de chacun et à l’unité de l’Église.


Mais nous parlons, nous, de la protection de personnes vulnérables et même de la punition des malfaiteurs. C’est un autre texte du Nouveau Testament qui donne le cadre le plus clair ici. C’est Romains 13, que Paul a écrit un an ou deux après 1 Corinthiens. On va le lire :

Que tout homme se soumette aux autorités supérieures, car il n’y a pas d’autorité qui ne vienne de Dieu, et celles qui existent ont été mises en place par Dieu. C’est pourquoi celui qui s’oppose à l’autorité lutte contre une disposition établie par Dieu, et ceux qui sont engagés dans une telle lutte recevront le châtiment qu’ils se seront attiré. Car ce sont les malfaiteurs, et non ceux qui pratiquent le bien, qui ont à redouter les magistrats. Veux-tu ne pas avoir peur de l’autorité ? Fais le bien, et l’autorité t’approuvera. Car l’autorité est au service de Dieu pour ton bien. Mais si tu fais le mal, redoute-la. Car ce n’est pas pour rien qu’elle peut punir de mort. Elle est, en effet, au service de Dieu pour manifester sa colère et punir celui qui fait le mal. C’est pourquoi il est nécessaire de se soumettre à l’autorité, non seulement par peur de la punition, mais surtout par motif de conscience. C’est pour les mêmes raisons que vous devez payer vos impôts. Car ceux qui les perçoivent sont eux aussi au service de Dieu, dans l’exercice de leurs fonctions. Rendez donc à chacun ce qui lui est dû : les impôts et les taxes à qui vous les devez, le respect et l’honneur à qui ils reviennent.


Dans la pensée biblique, les structures sociales sont voulues par Dieu pour notre bien. Elles peuvent être injustes et faire le contraire de ce que Dieu a voulu. L’empereur romain à qui il fallait payrer des impôts, c’était Néron ! Parfois il faut résister aux autorités, comme Pierre et Jean devant le sanhédrin, comme les chrétiens qui ont refusé d’adorer l’empereur, comme ceux qui ont protégé les juifs au siècle dernier. Mais, de façon générale, que ce soit dans la famille, dans le travail ou dans la société, l’autorité est une bonne chose, elle existe pour notre bien – et pour punir le mal.


C’est cela qui permet au chrétien d’abandonner toute pensée de vengeance, comme en Romains 12 :17-21

Ne répondez jamais au mal par le mal. Cherchez au contraire à faire ce qui est bien devant tous les hommes. Autant que possible, et dans la mesure où cela dépend de vous, vivez en paix avec tous les hommes. Mes amis, ne vous vengez pas vous-mêmes, mais laissez agir la colère de Dieu, car il est écrit : C’est à moi qu’il appartient de faire justice ; c’est moi qui rendrai à chacun son dû. Mais voici votre part : Si ton ennemi a faim, donne-lui à manger. S’il a soif, donne-lui à boire. Par là, ce sera comme si tu lui mettais des charbons ardents sur la tête. Ne te laisse jamais dominer par le mal. Au contraire, sois vainqueur du mal par le bien.


Une victime peut très bien prier pour la personne qui a fait du mal et renoncer à toute vengeance personnel, tout en faisant appel à la justice de Dieu et à ceux qui sont chargés de la mettre en œuvre sur la terre. Elle doit même faire ainsi, pour son propre bien et pour le bien de tous. Confronter un agresseur à la réalité des faits, c’est en fait ce qui peut lui arriver de mieux, pour qu’il répare dans la mesure du possible et qu’il change.

A plusieurs reprises, l’apôtre Paul a fait appel à la justice de son temps. Dans la ville de Philippes, en Actes 16, il est battu de verges devant tout le monde et jeté en prison. Les magistrats veulent ensuite le libérer en toute discrétion. Mais Paul sait qu’ils ont agit contrairement à la loi, car il était citoyen romain. Il exigent donc que les magistrats viennent en personne le libérer. Il les humilie. Ce faisant, il fait valoir la loi et protège l’annonce de l’Évangile à l’avenir.


Un peu plus tard, il et arrêté dans le temple de Jérusalem. On va le fouetter, et de nouveau il sort l’atout de sa citoyenneté romaine. Il fait peur au chef de la garnison, il obtient d’être traité avec des égards et, plus tard, d’être protégé contre un complot qui visait à le supprimer. Finalement, devant la justice provinciale corrompue, il en appelle à César.


Pour nous, il n’y a aucune hésitation à avoir. La loi est au service de Dieu pur notre bien et pour la protection des personnes vulnérables.


Gordon Margery

 

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